Chronique #47 - Les Soleils des indépendance, Ahmadou Kourouma

By Camille - juin 10, 2020



Je vais vous l'avouer : je ne sais pas comment commencer cet article. D'habitude je donne un contexte, je sais directement de quoi je vais parler, les points qui m'ont plu etc. Pour ce livre, c'est complètement flou. Déjà parce que je fais ma chronique deux semaines après l'avoir lu comme d'habitude, mais aussi parce qu'il y a un chapitre qui m'est resté en tête. Un. Qui a réussi à éclipser tout le reste du roman. 

Pour vous donner un peu de matière quand même, j'ai étudié un extrait de ce livre cette année en cours et j'avais vraiment adoré. Il y avait un mélange entre la culture ivoirienne, un peu de fantastique et de magie qui découle de cette culture (vous savez à quel point j'ai adoré ça aussi dans Akata Witch, mais ce sera l'unique point de comparaison parce qu'on est quand même ici sur un livre bien différent), et aussi beaucoup d'oralité (et on reviendra sur ce point). En gros, un mélange de choses que j'avais peu l'habitude de voir en littérature et ça m'a plu. Quelques mois plus tard, j'ai reparlé avec ma professeure de ce livre, et elle m'a glissé qu'il y avait dedans une scène d'excision particulièrement difficile. C'est peut-être un peu glauque, mais ça a attiré ma curiosité, parce que l'excision est un sujet que je ne connais que très peu et surtout, que j'ai très peu vu en littérature. 

Vous l'aurez peut-être compris, le chapitre dans lequel on parle de ce sujet m'a marqué, tellement marqué que c'est aujourd'hui l'une des seules scènes qu'il me reste en tête. Pour le reste, je peux tout de même vous dire que ce roman était particulier, il était vrai et authentique. Dans Les Soleils des indépendances, on suit les aventures de Fama, descendant et chef d'une tribu malinkée. Après les indépendances coloniales qui ont vu le jour dans les années 60, Kourouma raconte ce qui a pu changer dans cette société profondément transformée par la décolonisation. Et le mot raconter ne pourrait pas être mieux choisi : ce livre, c'est une histoire racontée à l'oral, c'est une sorte de conte qu'on nous lirait. Les phrases sont plutôt musicales, je me suis même prise à lire certains passages à l'oral, et nous plongent totalement dans la tradition de ces tribus. Il n'a pas toujours été évident de s'immerger complètement, parce qu'il y avait des mots et coutumes que je ne connaissais pas mais c'était enrichissant de pouvoir en apprendre toujours plus. 

Parlons maintenant de ce fameux chapitre. L'auteur laisse la parole au personnage de Salimata, la femme de Fama, au tout début du roman. On plonge alors dans son passé, dans tout ce qu'elle a vécu. TW : on parle excision et viol dans ce roman. Ça n'a clairement pas été facile de lire ces passages. L'auteur mettait bien en avant le décalage qui existe entre certaines personnes présentant l'excision comme un moment de fête, de pureté du corps, et la violence réelle que représente cet acte pour toute personne l'ayant subi. Comme je l'ai répété, la scène reste gravée dans ma mémoire. Et peut-être est-ce à cause de ça, mais j'ai été particulièrement attentive au rôle des femmes dans ce roman : on parle aussi de polygamie, de la place des femmes dans ces couples polygames, mais aussi de leur rôle principal, celui d'enfanter. 

Je dirais donc que c'était un livre poignant, singulier, qui m'a marqué par plusieurs aspects. Même si j'ai eu un peu de mal à le lire par moments, c'était un très beau livre. 

Cam 

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