Bonjour à toi !
Il y a quelques temps sur twitter, je lançais un appel aux noms de poétesse. La littérature en regorge mais celles-ci sont peu étudiées à l'école si bien qu'elles restent dans l'ombre. Aujourd'hui, je vous propose un condensé de ce qu'il m'a été proposé, quelques poèmes, et une redécouverte des merveilles de la poésie.
Ceci sera une série d'articles contenant chacun cinq poèmes de poétesses à découvrir, j'espère qu'ils vous plairont et qu'ils seront remplis pour vous de découvertes.
Marceline Desbordes-Valmore, « les roses de Saâdi », Poésies inédites
J’ai voulu ce matin te rapporter des roses ;
Mais j’en avais tant pris dans mes ceintures closes
Que les nœuds trop serrés n’ont pu les contenir.
Les nœuds ont éclaté. Les roses envolées
Dans le vent, à la mer s’en sont toutes allées.
Elles ont suivi l’eau pour ne plus revenir ;
La vague en a paru rouge et comme enflammée.
Ce soir, ma robe encore en est tout embaumée…
Respires-en sur moi l’odorant souvenir.
Renée Vivien, « A l'ennemie aimée », Dans un coin de violettes
Tes mains ont saccagé mes trésors les plus rares,
Et mon cœur est captif entre tes mains barbares.
Et mon cœur est captif entre tes mains barbares.
Tu secouas au vent du nord tes longs cheveux
Et j’ai dit aussitôt : Je veux ce que tu veux.
Et j’ai dit aussitôt : Je veux ce que tu veux.
Mais je te hais pourtant d’être ainsi ton domaine,
Ta serve… Mais je sens que ma révolte est vaine.
Ta serve… Mais je sens que ma révolte est vaine.
Je te hais cependant d’avoir subi tes lois,
D’avoir senti mon cœur près de ton cœur sournois…
D’avoir senti mon cœur près de ton cœur sournois…
Et parfois je regrette, en cette splendeur rare
Qu’est pour moi ton amour, la liberté barbare…
Qu’est pour moi ton amour, la liberté barbare…
Anna de Noailles, « Le Port de Palerme », Les Vivants et les morts
Je regardais souvent, de ma chambre si chaude,
Le vieux port goudronné de Palerme, le bruit
Que faisaient les marchands, divisés par la fraude,
Autour des sacs de grains, de farine et de fruits,
Sous un beau ciel, teinté de splendeur et d’ennui…
J’aimais la rade noire et sa pauvre marine,
Les vaisseaux délabrés d’où j’entendais jaillir
Cet éternel souhait du cœur humain : partir !
-Les vapeurs, les sifflets faisaient un bruit d’usine
Dans ces cieux où le soir est si lent à venir…
C’était l’heure où le vent, en hésitant, se lève
Sur la ville et le port que son aile assainit.
Mon cœur fondait d’amour, comme un nuage crève.
J’avais soif d’un breuvage ineffable et béni,
Et je sentais s’ouvrir, en cercles infinis,
Dans le désert d’azur les citernes du rêve.
Marguerite Yourcenar, « Vous ne saurez jamais... », Les charités d'Alcippe
Vous ne saurez jamais que votre âme voyage
Comme au fond de mon cœur un doux cœur adopté
Et que rien, ni le temps, d'autres amours, ni l’âge
N'empêcheront jamais que vous ayez été;
Que la beauté du monde a pris votre visage,
Vit de votre douceur, luit de votre clarté,
Et que le lac pensif au fond du paysage
Me redit seulement votre sérénité.
Vous ne saurez jamais que j'emporte votre âme
Comme une lampe d'or qui m'éclaire en marchant;
Qu'un peu de votre voix a passé dans mon chant.
Doux flambeau, vos rayons, doux brasier, votre flamme
M'instruisent des sentiers que vous avez suivis,
Et vous vivez un peu puisque je vous survis.
Marie Krysinska, « Symphonie des parfums », Rythmes pittoresques
Je veux m’endormir dans le parfum des roses fanées, des sachets vieillis, des encens lointains et oubliés. –
Dans tous les chers et charmeurs parfums d’autrefois. –
Mes souvenirs chanteront sur des rythmes doux, et me berceront sans réveiller les regrets.
Tandis que le morne et spléenétique hiver pleure sur la terre inconsolée,
Et que le vent hurle comme un fou,
Tordant brutalement les membres grêles des ormes et des peupliers,
Je veux m’endormir dans le parfum des roses fanées,
Des sachets vieillis, des encens lointains et oubliés.
Et les rythmes et les parfums se confondront en une subtile et unique symphonie;
Les roses fanées se lèveront superbes et éclatantes,
Chantant avec leurs lèvres rouges les vieilles chansons aimées;
Elles s’enlaceront aux pâles jasmins et aux nénuphars couleur de lune;
Et je verrai passer leurs ombres miroitantes, comme en une ronde des robes de jeunes filles.
Les clochettes des liserons chanteront avec leurs parfums amers – les mortelles voluptés;
La violette à la robe de veuve dira les tendresses mystiques et les chères douleurs à jamais ignorées;
L’héliotrope avec son parfum vieillot et sa couleur défraîchie, fredonnera des gavottes, ressuscitant les belles dames poudrées qui danseront avec des mouvements lents et gracieux.
Musc minuscule et compliqué comme une arabesque,
Scabieuse, – reine des tristesses,
Opoponax dépravé comme une phrase de Chopin,
Muguet, – hymne à la gloire des séraphiques fraîcheurs,
La myrrhe solennelle, le mystérieux santal,
L’odeur du foin coupé, – sereine et splendide comme un soleil couchant,
Iris où pleurs l’âme des eaux dormantes,
Lilas aux subtils opiums,
L’amoureuse vanille et le chaud ambre gris
S’uniront en des accords grondants et berceurs – comme les orgues et comme les violons
Évoquant les visions cruelles et douces
Les extases évanouies, – les valses mortes, – les cassolettes éteintes et les lunes disparues.
Tandis que le morne et spléenétique hiver pleure sur la terre inconsolée;
Et que le vent hurle comme un fou, tordant brutalement les membres grêles des ormes et des peupliers,
Je veux m’endormir dans le parfum des roses fanées, des sachets vieillis, des encens lointains et oubliés.
Sur ces doux vers, je vous souhaite une bonne fin de semaine,
Cam
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